Faire face au "quiet firing" (ou le licenciement déguisé) ?

Le quiet firing consiste à  dégoûter un salarié, par des techniques de démoralisation ou d'humiliation, parfois de travail empêché, afin qu'il démissionne de lui même et ne puisse exiger des indemnités. Un procédé vicieux utilisé par certaines entreprises non éthiques et malheureusement très présent dans certaines administrations -Education Nationale, Police, Ministère de la Santé,... 

  

Se trouver oublié dans les réunions Teams, ne pas obtenir d'éclaircissement sur une tâche, voir être snobé dans l'organigramme? Autant d'éléments qui laissent supposer un risque de quiet firing, c'est à dire de licenciement déguisé avec mise au placard par une direction peu scrupuleuse.   

Une difficulté à caractériser le quiet firing

 Alors que le harcèlement moral est assez vite repéré dans une entreprise, les mécaniques du quiet firing sont plus subtiles et difficiles à mettre en évidence. Il existe évidemment toute une panoplie d'indices: le refus de répondre à certaines questions,  les stratégies d'isolement du salarié, différentes formes d'humiliation comme  demander des tâches en dessous du niveau du salariés devant des collègues  ou encore d'une gestion particulière du silence  .  A la question 'quelles sont mes attributions pour la semaine prochaine ?', vous n'obtenez pas de réponse.


"En cas de quiet firing, le travail demandé s'inscrit par ailleurs souvent en décalage par rapport aux valeurs que les salariés ont envie de défendre "

Parfois c'est le travail lui-même qui est impacté, soit qu'il y ait  excès de demande de travail, ou alors absence de tâches à réaliser. En cas de quiet firing, le travail demandé s'inscrit par ailleurs souvent  en décalage par rapport aux valeurs que les salariés ont envie de défendre . Du coup, le salarié se trouve dans une situation psychologique particulièrement fragilisée. L'équilibre entre la vie professionnelle et la vie personnelle peut être aussi négligé par les managers qui pratiquent le quiet firing.  On peut vous demander de venir travailler certains week-ends  sans raison apparente. Sans oublier  le retrait de certains avantages acquis sans justification comme l'interdiction désormais d'utiliser la voiture de société de l'entreprise. 

Les salariés qui subissent du quiet firing, ruminent, s'isolent et perdent peu à peu confiance en eux.  

 Réagir à temps

Les salariés qui subissent du quiet firing, ruminent, s'isolent et perdent peu à peu confiance en eux. Il est urgent de réagir à temps, même lorsque les manifestations du quiet firing, par définition, sont subtiles.  Première initiative: demander immédiatement des explications, orales d'abord, confirmées ensuite par écrit par le salarié. Objectif: laisser des traces.  Dans le meilleur des cas, cette stratégie permet de mettre fin à  un sentiment larvé de harcèlement et tout rentre dans l'ordre. Dans le cas contraire, il faut commencer à construire un dossier précis de tous les faits de déni du travail, de la tâche, du poste ou du titre constatés: lieu, date, heure, circonstances, personnes présentes.

"Une plainte pour harcèlement va obliger l'employeur à diligenter une enquête interne."

Saisir la justice

Deuxième action à engager, prévenir la Drh et faire une plainte écrite qui oblige l'entreprise à diligenter une enquête interne pour harcèlement. L'étape suivante est la saisie du Conseil des prud'hommes. A ce stade, l'entreprise risque souvent de préférer engager des négociations plutôt que de risquer une action en justice. La qualité du dossier constitué est alors essentielle pour négocier un départ au mieux.     

L'entreprise risque souvent de préférer engager des négociations plutôt que de risquer une action en justice.




Le cas particulier de l'administration

Le "quiet firing", s'il est présent dans les entreprises privées, fait des ravages dans les administrations et chez les fonctionnaires. Pourquoi? Tout simplement parce que le licenciement n'existe pas et que certains responsables peu scrupuleux considèrent que la seule manière de se débarrasser d'un membre de l'équipe consiste à le...harceler. On retrouve des comportements tout à fait condamnables aussi bien dans l'Education nationale, dans la police, dans les hôpitaux. Et ceci est d'autant plus vrai que paradoxalement, un fonctionnaire harcelé a souvent moins d'outils de défense à sa disposition que le salarié du privé. D'où la nécessité d'être vigilant, de réagir très vite en informant le N+1, puis la Drh, et de saisir toutes les autorités en charge du harcèlement dans l'administration considérée.